Pourquoi Chamboultout m’a chamboulée

Au début, le titre de ce film ne m’avait pas convaincue. Mais rapidement, je me suis intéressée à son sujet : comment une épouse a vécu un changement de vie terrible face au grave handicap de son mari. C’est un film choral autour d’un couple très convaincant : Fred et Béatrice interprétés par José Garcia et Alexandra Lamy. Le rigolo compère d’ Antoine de Caunes s’est volontairement mis à l’écart pour jouer cet homme devenu aveugle et totalement désinhibé.

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Copyright Nathalie Mazéas / Same Player / Gaumont

Désormais, je me déplace au cinéma pour chaque film d’ Alexandra Lamy car depuis Retour chez ma mère (d’Eric Lavaine également), Tout le monde debout de Franck Dubosc ou bien Le poulain dernièrement, je la considère comme une actrice incontournable dans le genre de la comédie dramatique. Ses premiers films comme Rickie de François Ozon m’avaient laissé quelque peu dubitative mais c’est génial le tournant que prend sa carrière cinématographique ces dernières années. Vive les actrices à l’approche de la cinquantaine !

Chamboultout, comédie dramatique d’Eric Lavaine avec Alexandra Lamy, José Garcia, Mickael Youn, Anne Marivin, Medi Sedoun, Olivia Côte, Michel Vuillermoz….

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Le résumé :

Béatrice vit à Bordeaux avec son mari Fred et leurs trois enfants. Ils ont la quarantaine, un peu d’argent et la vie devant eux. Un stupide accident de scooter fait basculer leur vie dans le lourd handicap : on ne sait pas ce qui est le plus pesant : la cécité de Fred ou bien sa totale désinhibition. Ils se retrouvent chaque été avec leur bande d’amis dans une maison de vacances de Biarritz. Mais l’harmonie amicale va être mise à mal à la lecture du livre de Béatrice. Elle a couché sur le papier ces cinq années difficiles à travers un roman d’autofiction qui bouscule leurs amis…

Mon avis :

Au début, j’ai trouvé les dialogues et le jeu des personnages un peu caricatural à l’image de Barbecue, un précédent film d’Eric Lavaine. Et puis quand on se concentre sur les deux personnages principaux : Fred et Béatrice, nos émotions s’envolent.

On ressent une sacrée compassion pour cette épouse qui cherche affolée son mari dans les rues de Bordeaux, qui fait preuve d’une grande patience quand il se gloutonne l’immense fraisier préparé pour sa fête d’anniversaire et quand on comprends que ce n’est plus vraiment un couple égal.

L’amour charnel s’est transformé en maternage pour Béatrice qui doit surveiller l’alimentation de son mari comme un enfant, s’occuper de lui la nuit. La scène où il s’enfuit la nuit au bord des falaises est captivante, j’ai vraiment été émue de la solidarité entre Béatrice et sa belle-soeur qui étaient alors en froid.

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Copyright Nathalie Mazéas / Same Player / Gaumont

Ils sont entourés d’une bande d’amis tous bien portants mais sacrément handicapés émotionnellement : il y a Nadia, magistralement campée par Anne Marivin. Elle joue une femme totalement insécure qui étouffe Béatrice en se servant de leur malheur pour se valoriser, son mari Fabrice (Mickael Youn) est prisonnier de ses addictions à aller voir ailleurs, il y a aussi Jipé le vrai gentil de la bande un peu neuneu sur les bords, Loïc prêt de ses sous et sa femme Valérie qui va faire une belle équipe de commères avec Nadia… Seule Emmanuelle, la meilleure amie de Béatrice comprend la réalité vécue par son amie. Elle fait preuve d’un soutien sans faille et la défend bec et ongles pour raisonner les autres, les inciter à oublier leur petit ego narcissique pour entourer ce couple de l’amour dont ils méritent.

La publication du roman de Béatrice fait vaciller leur amitié car chacun est inquiet de l’image qu’il renvoie au lieu de se mettre à sa place. Elle s’est lancée dans l’entreprise de ce livre pour se consoler, c’est une forme de résilience pour encourager les familles d’handicapés qui voient leur vie basculer du jour au lendemain.

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Copyright Nathalie Mazéas / Same Player / Gaumont

Je reproche beaucoup aux comédies françaises de valoriser l’adultère alors que même les comédies et les séries anglo-saxonnes plus trash ne rigolent pas la-dessus. Cela me fait bondir quand des scénaristes font passer le message que l’adultère renforce le couple. C’est un mensonge, l’adultère fragilise forcément le couple, il brise la confiance en l’autre et l’estime de soi.

L’adultère est un des sujets de ce film. Pour moi, quand on épouse quelqu’un on lui accorde fidélité et exclusivité qu’il soit malade ou bien portant. Pourtant, il serait très maladroit de juger cette épouse qui fait preuve d’une grande tendresse et bienveillance envers son mari. Leur couple n’est définitivement plus le même, l’amour s’est transformé, la sexualité ne fait plus partie de leur intimité et c’est terrible à vivre. Mais rien ne justifie de cacher la vérité.

La fille de Béatrice lui fait de sacrées remontrances, assez terribles à assumer pour cette maman. Je pense que cet aspect de leur vie est beaucoup plus développé dans le roman de Barbara Halary La course de la mouette, édité par La Martinière. Elle est co-scénariste de ce film librement inspiré de sa vie.

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Ma note : 4/5 sardines

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Même si les scènes de bande dans la maison de vacances m’ont un peu lassée, elles ont permis de mettre en lumière nos petites médiocrités à tous, notre ingratitude d’être bien portants et de sortir des énormités aux amis proches qui vivent des moments difficiles à cause du handicap.

J’ai vraiment été touchée par la manière très subtile de traiter comment le handicap bouleverse la vie quotidienne des trois enfants du couple, quand leur plus grande fille doit réconforter et encourager son papa à réussir de chanter La lumière du jour de Michel Berger dans la scène finale du film.

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Copyright Nathalie Mazéas / Same Player / Gaumont

 

Un vendredi soir devant la cérémonie des Césars 2019

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C’est ma meilleure soirée de télévision chaque année : la remise des prix des Césars à la salle Pleyel sur Canal+. Je me régale toujours à regarder les belles robes haute couture des actrices, écouter les interviews des nominés tout en mangeant, avant la sonnerie qui marque le début de la cérémonie.

La cérémonie des Césars, cru 2019

Cette année, c’était Kad Merad, le maître de cérémonie. Je ne parlerai que de ce que j’ai bien aimé de sa prestation : les dix premières minutes d’ouverture avec trois ou quatre tableaux de comédie musicale en l’honneur de Queen et de Bohémian Rapsody. Il a été époustouflant en arrivant avec un faux sceptre-micro, une longue cape qui rappelait la démesure de Louis XIV ou celle de Michael Jackson pour interpréter ce pastiche très réussi de Freddie Mercury.

Malheureusement, ça se gâte au fil de ces trois longues heures, sous le regard parfois consterné de Robert Redford, l’invité d’honneur de cette année.

Robert Redford est l’un de mes acteurs américains favoris, je ne connais que la fin de sa carrière (il a plus de 80 ans) mais j’aime beaucoup sa sensibilité romantique quand le cinéma raconte l’une de ses histoires d’amour : L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux avec Kristin Scott-Thomas, Nos âmes la nuit avec Jane Fonda, deux adaptations de romans au cinéma.

Our Souls At Night

Our Souls At Night

L’Académie des césars plébiscite des drames sociaux cette année : Shéhérazade, Les chatouilles et Jusqu’à la garde.

Je n’irai sans doute pas voir ces trois films parce qu’ils sont d’une grande dureté : moi j’ai plutôt plébiscité Pupille, un beau film sur l’amour porté à un nourrisson confié à l’adoption.

Shéhérazade montre un petit couple d’ados à Marseille qui s’est foutu dans une sale histoire : elle fait le trottoir, lui récupère son gain mais il tombe aussi amoureux…

Les chatouilles raconte l’histoire vraie de la réalisatrice Andréa Bescond, qui a été victime d’un pédocriminel, dans son enfance, un ami de la famille. C’est tellement plus précis de parler de pédocriminalité et non de pédophilie.

Jusqu’à la garde est un drame : Léa Drucker et Denis Ménochet se retrouvent devant le juge aux affaires familiales pour se disputer la garde de leurs enfants. La juge lit une lettre terrible d’un petit garçon d’une dizaine d’années qui demande à ne plus jamais voir son père, est-il manipulé par sa mère ou veut-elle le protéger d’un homme violent ?.

La cérémonie des Césars récompense la plupart du temps un cinéma intello (moins que le festival international de Cannes) dans lequel je ne me reconnais pas toujours mais qui représente bien cette fameuse exception culturelle française.

C’est pour cela que les grands écarts avec la culture populaire qui remplit les salles de cinéma sont vraiment des moments gênants au cours de cette cérémonie. Un César du public pour les Tuche 3, c’est un peu fort de café. La comédie est le genre cinématographique le plus difficile à construire. Cette année, j’ai beaucoup aimé le retour de la famille Verneuil de Qu’est ce qu’on a encore fait au bon Dieu?.

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Copyright Arnaud Borrel

Souvent la comédie reçoit un accueil glacial le soir des Césars alors que ce sont les comiques qui font l’audience de la cérémonie.

Soit les remettants ou les lauréats font de grands discours élaborés sur l’art du cinéma, à l’image d’Alex Lutz qui cite Cioran : « Dans un monde sans mélancolie, les rossignols se mettraient à roter » Comprenne qui pourra… Ou alors les remettants essayent de faire rire un auditoire très exigeant et se prennent un four.

Car tout le monde n’a pas le génie d’ Elie Semoun qui marque les esprits chaque année. Déguisé en Tootsie pour recevoir Dustin Hoffmann il y a quelques années, il a osé tomber le peignoir de bain en référence à la comédie Le grand bain de Gilles Lellouche. Avec ses méduses, son ventre bedonnant et habillé par le Slip français, il est allé loin dans l’exhibitionnisme sans jamais tomber dans la vulgarité. Chapeau l’artiste !

Mes coups de cœur cinéma :

Pupille de Jeanne Herry (une jeune réalisatrice prometteuse dans un milieu essentiellement masculin) avec Elodie Bouchez, Miou-Miou, Gilles Lellouche (qui méritait le César du meilleur acteur).

L’incroyable histoire du facteur Cheval de Nils Tavernier avec Jacques Gamblin et Laetitia Casta.

 

 

En janvier 2019, la famille Verneuil et ses gendres reviennent au cinéma nous faire rire !

 

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« La France est un paradis peuplé de gens qui se croient en enfer « .

Sylvain Tesson, écrivain

C’est Marie Verneuil, la sympathique grand-mère du film Qu’est ce qu’on a encore fait au bon Dieu et sa suite, qui cite cette phrase de Sylvain Tesson pour convaincre ses quatre gendres de toutes origines, de rester vivre en France avec leurs familles.

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Copyright Arnaud Borrel

Quelle bonne idée d’avoir organisé une avant-première dans un grand nombre de cinémas en France le 1er janvier 2019. On retrouve la famille Verneuil au complet avec beaucoup de plaisir. Cette famille est à l’image de la France de 2019 : multi-culturelle. Nous sommes allés voir le film dans une immense salle de 500 places du complexe CGR de la porte des Lilas.

Il n’y avait plus un seul fauteuil de libre, les familles chrétiennes, juives et musulmanes s’étaient déplacées pour rire de situations politiques et sociales cocasses imaginées par les deux scénaristes du film : Philippe de Chauveron et Guy Laurent.

Cette suite est très réussie car elle reprend les ingrédients qui ont fait le succès du premier film : la présence du comédien génial Pascal Nzonzi qui forme toujours un duo comique formidable avec Christian Clavier, les quatre gendres sont talentueux (ils viennent pour beaucoup du stand-up) et surtout on rit des amalgames raciaux, des clichés xénophobes sans jamais tomber dans la provocation ou l’humiliation publique d’une communauté (ça change de Premières vacances qui caricature la Bulgarie, grr !).

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Je vous recommande ce film génial qui a réussi l’exploit pour une suite de faire aussi bien, sinon mieux que le premier film. Le casting du film y est pour beaucoup.

Il s’agit d’un film choral qui réunit deux générations d’humoristes : Christian Clavier (la troupe du Splendid et leurs films iconiques) , Chantal Lauby ( les Nuls de Canal +) associés à une nouvelle génération issue du Jamel Comedy Club en grande partie : Ary Abittan, Noom Diawara, Frédéric Chau, Medi Sadoun, Claudia Tagbo… et des comédiennes talentueuses comme Frédérique Bel, Elodie Fontan, Julia Piaton…

 

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Copyright Arnaud Borrel

C’est une belle histoire qui rend hommage à la France mais aussi qui valorise l’amour familial : les époux Verneuil vont unir leurs forces et leur argent en se démenant pour leur famille : ils tiennent aux réunions de famille, ils veulent voir grandir leurs petits-enfants…

Et bien évidemment la suite comme le premier film se termine par un mariage avec de la musique de fête ….

Pupille, quand le cinéma montre un triomphe collectif

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Pupille est le film qui m’a le plus marqué en 2018 (il n’y en a pas eu beaucoup, je dois dire). J’attendais sa sortie avec impatience : peut-être est-ce le fait que je vais devenir parent prochainement en février ?.

J’ ai vraiment été convaincue par les interviews de Jeanne Herry, sa réalisatrice et de Gilles Lellouche, le « héros » masculin de l’histoire, qui joue un rôle à contre-emploi tout à fait attendrissant.

Jeanne Herry s’est servie de l’histoire personnelle d’une de ses amies sur le chemin tortueux de l’adoption pour écrire une histoire pleine de vie et de sensibilité. Elle traite d’un thème social très subtil : l’accouchement sous X et l’adoption qui peuvent faire peur aux spectateurs.

Elle s’éloigne des codes du reportage en maternité et du cinéma documentaire pour bâtir une fiction romanesque qui nous emmène des rires aux pleurs, suivre le parcours éprouvant mais tellement constructif d’une jeune femme, Alice (Élodie Bouchez) . Elle a attendu pendant huit ans qu’une institution de l’État lui confie un enfant à adopter.

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Copyright Studio Canal

Le résumé :

Une jeune mère, Clara, refuse qu’on enregistre son identité à la maternité afin d’accoucher sous X. Mathilde, fonctionnaire chargée des services d’adoption à Brest, va l’aider à remettre son fils Théo à l’ État comme pupille.

Au cours des deux mois pendant lesquels elle a le droit de se rétracter, une succession de fonctionnaires vont prendre son relais pour lui donner tout l’amour et l’attention dont il a été privé à la naissance, en respectant les procédures administratives à la lettre.

Ainsi interviendront une sage-femme attendrie (Stéfi Celma), des puéricultrices, les éducateurs spécialisés comme Karine (géniale Sandrine Kimberlain) , Jean l’assistant maternel (Gilles Lellouche) et le conseil de famille chargé de son adoption dont Lydie (Olivia Côte), celle qui va discerner quelle mère serait la plus apte à s’occuper de cet enfant.

 Mon avis :

Pupille est un film magnifique, ayant un message politique fort : il rend hommage aux services de l’État qui ne ménagent pas leur peine, ni leurs moyens pour permettre à un bébé de se construire affectivement tout en garantissant le secret de l’identité de sa maman.

Comme le soulignait Gilles Lellouche dans de nombreuses interviews, ce film fait comprendre au grand public combien payer des impôts en France sert l’intérêt public. C’est un très joli pied de nez à la montée de l’individualisme ambiant. Ce film montre la force du collectif qui unit ses forces dans un but commun.

Particulièrement à travers une scène. Les éducatrices spécialisées font comprendre à Mathilde qu’elle doit agir pour que le petit Théo n’entre pas dans une forme de léthargie déprimante. La sage-femme qui l’a accouché, aide ce bébé en écoutant aux portes quand la maman vient dire au revoir à son bébé mais qu’elle est incapable de lui parler.

Or la réalisatrice expliquait qu’il est primordial qu’un mère qui confie son enfant l’autorise verbalement et symboliquement à entrer dans un projet d’adoption avec un autre parent.

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Copyright Studio Canal

Les références au travail de longue haleine de Françoise Dolto sont flagrantes, elles procurent même au film les meilleures répliques :

« Un bon candidat à l’adoption, ce n’est pas quelqu’un qui n’a jamais rien vécu de fâcheux. On a tous un champs de mines et un champs de fleurs. Notre travail c’est de savoir comment vous vous êtes occupés de votre propre champs  » dit Lydie à la future mère adoptive, Alice.

« Tout ira bien, tu es un super mec » dit Gilles Lellouche au bébé de deux mois qui va rencontrer dans un instant sa mère adoptive. Tout se joue dans les mots, choisis avec précision et clarté.

Prendre un bébé inconnu dans ses bras, lui donner de l’amour n’est pas du tout incompatible avec la procédure administrative, c’est même fortement recommandé pour prendre soin de lui.

Ma note :

5/5 sardines

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Je vous recommande ce film magnifique qui est joyeux et qui donne de l’espérance : oui, il y a toujours une assistance sociale et éducative de la part de l’État en France en 2018. C’est parfois le rôle de la télévision ou celui du cinéma de le rappeler à ses concitoyens, aux autorités politiques qui votent leurs budgets : le film Pupille ou encore la série Famille d’accueil sur France 3.

Jeanne Herry est une grande réalisatrice à suivre par la suite. Elle signe un film qui rend un bel hommage à Françoise Dolto sans occulter les problèmes très difficiles qui secouent les assistants maternels comme Jean au début du film.

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Copyright Studio Canal

Ils sont parfois lessivés par leur rôle quand un frère tente d’étrangler son cadet. On saisit alors toute la difficulté éprouvée par Jean quand il ne parvient pas à faire comprendre à son supérieur que maintenir le lien et ne pas vouloir séparer les fratries à tout prix peut s’avérer très dangereux…

Dans un prochain article, je vous chroniquerai un ouvrage qui retrace le travail de Françoise Dolto, une référence incontournable pour moi.

En attendant, voici une vidéo magnifique d’une puéricultrice reconnue, Sonia Krief qui parle avec tendresse et bienveillance aux nouveaux nés pendant leur tout premier bain.

Le film de la semaine : I feel good ou la critique de l’individualisme forcené

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J’attendais de longue date la sortie du film Le poulain : la prestation d’Alexandra Lamy en directrice de campagne aux dents longues, m’avait convaincue en regardant la bande-annonce. Mais la chronique ciné de La croix m’a plutôt conduite à aller voir le film I feel good avec Yolande Moreau et Jean Dujardin.

Un film qui fait honneur aux communautés Emmaüs, cela avait plus de sens pour moi que le cynisme des communicants de la vie politique pendant une heure trente.

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Copyright Ad Vitam

Il est bien loin le temps où l’on considérait Alexandra Lamy et Jean Dujardin comme des acteurs de télévision de seconde zone, par comparaison avec le septième art. Chouchou et Loulou ont fait du chemin (chacun de leur côté) depuis une décennie.

Ils ont donné vie avec tout leur talent à des personnages qui nous font rire, sourire, qui nous émeuvent aussi que ça soit la jeune femme handicapée, l’ un des plus beaux rôles d’Alexandra Lamy dans le film Tout le monde debout de Franck Dubosc ou le lieutenant lâche et fourbe interprété par Jean Dujardin dans le film Le retour du héros dernièrement.

La carrière cinématographique de Jean Dujardin s’est envolée avant The artist, avec les films OSS 117 et son fameux rôle de crétin. Jacques, le personnage principal du film I feel good est le digne héritier d’Hubert Bonisseur de la Bath.

C’est la première fois que je regardais un film réalisé par Gustave Kervern et Benoit Délépine. Je n’étais pas bien rassurée car mon fraternel regardait régulièrement Groland sur Canal + et autant vous dire que cet humour bien gras et scabreux n’était pas du tout ma tasse de thé.

J’ai trouvé qu’ils avaient fait preuve d’un profond respect envers la communauté Emmaüs et leur fondateur l’Abbé Pierre, ce qui leur vaut l’intérêt de la presse chrétienne.

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Photo Patrice Terraz

Le résumé :

C’est l’histoire de Jacques, un éternel ambitieux qui a été mis à la porte par ses parents en pleine crise de la quarantaine, après une vingtaine d’années sabbatiques à vivre à leurs crochets.

Des années après leur décès, il refait surface dans la vie de sa sœur Monique, qui dirige une communauté Emmaüs près de Pau. Ses parents comme sa sœur sont restés fidèles aux idéaux du communisme, Jacques lui, a cru en Bernard Tapie. Il n’ a pas le goût du travail, il cherche juste l’idée du siècle qui lui permettra de devenir très riche très vite : rendre les petites gens beaux. Il cherche alors à embobiner les compagnons d’Emmaüs pour les embarquer dans une formule low cost : faire de la chirurgie esthétique en Bulgarie….

« Tu sais que tu as un potentiel de séduction formidable.

Et si tu sortais de ta chrysalide ? « .

Mon avis :

C’était un film loufoque, absurde, parfois déprimant mais aussi avec beaucoup d’esprit, subversif pour donner matière à réfléchir sur le sens que chacun donne à sa vie. Il montre un homme aveuglé par la quête du profit, l’ argent facile. Il va droit dans le mur à vouloir gravir les marches de l’ascension sociale quatre par quatre.

Les deux réalisateurs dénoncent une société actuelle obsédée par l’apparence, la matérialité, la réussite. Avec I feel good, ce sont les ambitieux comme Jacques et son ancien camarade d’école Poutrin qui a fait fortune,  qui sont ridicules.

Les compagnons Emmaüs ont été confrontés à cette économie ultra-libérale qui ne laisse sa chance à personne. En ce qui concerne le pragmatisme et la sagesse, ils ont une bonne longueur d’avance sur Jacques et pourtant, ils ne lui donnent pas de leçons.

L’Abbé Pierre est mort en 2017 depuis plus d’une dizaine d’années, il est rare que l’on se souvienne de lui dans l’actualité médiatique. Pourtant, son oeuvre est plus que jamais un partenaire incontournable du paysage social et solidaire français et international avec ses 287 structures.

Cela me chiffonne un peu que ce film gomme toute la parenté chrétienne de ce mouvement, pour moi, on présente vraiment l’Abbé Pierre comme un altermondialiste. Ce n’est pas mal en soi d’être altermondialiste mais quand on sait qu’ aujourd’hui, cela ne veut plus rien dire d’être de gauche ou de droite, autant fonder son espoir sur les Évangiles que sur le Manifeste de Marx.

Ce grand ambitieux emmène ce petit groupe qui s’aime et se respecte sur les traces du communisme : le palais de Ceausescu à Bucarest en Roumanie, puis en Bulgarie à Buzludza.

C’est dans les montagnes, sur les hauteurs de Kazanlak, que le parti communiste a construit un gigantesque palais des congrès visible depuis la Roumanie et la Grèce. Il a été totalement vandalisé, les pilleurs ont désossé les mosaïques de pierres précieuses, tagué les fresques… Grâce à un film français, j’ai appris un peu plus de l’histoire de mon pays par alliance : la Bulgarie.

 

Ma note : 3/5 sardines

Mon avis est un peu mitigé. Gustave Kervern et Benoît Délépine ont trouvé un très bon sujet qui donne matière à réflexion : la solidarité, l’entraide comme remède à l’individualisme forcené.

Le gag final qui rend hommage à l’abbé Pierre  est savoureux. Jacques dit à son acolyte des coups foireux qu’il s’est rendu compte que les compagnons d’Emmaüs n’avaient pas besoin de chirurgie esthétique pour réussir car ils étaient beaux à l’intérieur.

C’est un film à voir mais il laisse une drôle d’impression. Je reste persuadée que le cinéma sert à enchanter les spectateurs, les aider à s’évader de la réalité et ce film comportait aussi quelques scènes peu esthétiques. On rit beaucoup avec ce film à cause de la médiocrité assumée de Jacques, magnifique Jean Dujardin !

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Je milite pour la valorisation des comédies aux Césars !

Vendredi soir c’était la remise des Césars, les récompenses du cinéma français. D’année en année, je commence à me lasser de cette cérémonie élitiste qui se coupe du public dans son ensemble. Le sens de la fête de Nakache et Toledano est rentré bredouille de cette cérémonie, preuve que les Césars ont un vrai souci avec les comédies.

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J’apprécie les films engagés, qui portent un message politique et social. Mais ce sont les comédies qui font déplacer les gens dans les cinémas : ce sont la Grande vadrouille, les Visiteurs, Intouchables ou encore Bienvenue chez les Ch’tis qui ont marqué les gens…

Vendredi soir, l’Académie des Césars a décerné le César du public au film Raid dingue de Dany Boon. C’est mérité parce que c’est la meilleure comédie de l’année 2017 selon moi.

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J’ai bien envie de revoir ce film qui m’a fait rire aux éclats et dont l’histoire était très bien construite. Dany Boon y tient un des rôles principaux mais il a eu la bonne idée de donner la part belle aux autres acteurs : Alice Pol en tête qui crève l’écran.

C’est une sorte de Pierre Richard au féminin. Elle rêve d’être flic depuis son enfance et le fait d’être la fille du ministre de l’Intérieur (Michel Blanc) va lui servir comme la desservir. Le patron du Raid (François Levantal, très talentueux) jouera de son autorité pour gérer tout ce petit groupe…. C’était une excellente comédie qui réunit d’excellents acteurs : Sabine Azéma, Florent Peyre, Yvan Attal….

J’ai souvent du mal avec les scénarios de Dany Boon que je trouve parfois creux et sans surprises : j’ai bien aimé Bienvenue chez les Ch’tis qui m’a fait découvrir une partie de l’identité de ma famille du Nord mais sérieusement la tournée des postiers à vélo qui rentrent ivres, c’était long.

Raid dingue est vraiment un film réussi car il rend hommage à un corps de métier et que le suspense est à son comble dans les dernières scènes du film. Yvan Attal apporte beaucoup de son talent dans un rôle de méchant complètement déjanté. César mérité Dany !!!. Quatre sardines pour Raid dingue, à revoir avec plaisir !

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Samedi après midi, j’ai vu la Ch’tite famille, réalisé et interprété par Dany Boon. Line Renaud joue encore sa maman mais ce n’est pas la suite de Bienvenue chez les ch’tis.

C’est l’histoire d’un designer qui a renié sa famille du Nord pour se réinventer une vie plus mainstream pour le milieu culturel parisien dans lequel il évolue avec sa femme et associé Constance (Laurence Arné, dont le rôle va à merveille).

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Malgré ses longueurs et ses caricatures parfois grotesques, ce film est assez malin et sans concession pour le milieu parisien branché mais déconnecté des réalités. Ce film n’est pas tout à fait autobiographique car Dany Boon a construit sa carrière d’humoriste sur ses origines qu’il n’a jamais renié.

Mais le fait de ne pas se souvenir de là où l’on vient quand l’on fait carrière à Paris est un thème très efficace qui fera écho aux vies de bien des spectateurs.

Je mettrai la note de trois sardines à ce film parce que la caricature des prolos du Nord m’a bien énervée une bonne partie du film.Il ne faudrait pas oublier qu’une grande partie des grandes familles bourgeoises de l’industrie française viennent aussi du Nord de la France (on interdisait formellement aux enfants bourgeois de parler ch’ti, Pierre Richard a du apprendre le ch’ti pour son rôle).

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Mais la dernière scène du film, hommage au voisin belge Johnny Hallyday, est très touchante : Que j’te ker…