Le prince à la petite tasse, tendre la main tout simplement.

J’ai découvert ce récit de vie à travers le portrait de son auteure, publié dans l’hebdomadaire protestant Réforme.

Le prince à la petite tasse

Emilie de Turckheim

Calmann Lévy, 2018

195 pages

17€

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Le résumé :

Il s’agit d’un journal publié chaque jour pendant neuf mois, où Emilie de Turckheim raconte comment avec son mari Fabrice et ses deux jeunes garçons : Noé et Marius, elle a accueilli Reza, un jeune migrant Afghan de 21 ans, dans son appartement parisien en 2017.

Il a quitté seul son pays en guerre à l’âge de douze ans, pour traverser  SOUS  un camion l’Europe afin de rejoindre la Norvège, terre d’accueil temporaire. Là bas, il a été baptisé protestant, sa mère afghane est une tadjik chrétienne dont il n’a plus de nouvelles depuis longtemps.

Son nom de baptême est Daniel, c’est lui qui l’a choisi en parcourant la Bible de long en large. Emilie est protestante et elle accueille à sa grande surprise, un frère chrétien venu de très loin…

La famille d’Emilie de Turckheim lui aménage une chambre, lui fait de la place dans le frigo familial, enlève de ses murs les nus artistiques photographiés, sans céder à la peur de cacher ses chéquiers, ses ordinateurs portables et autres objets de valeur.

Mon avis :


Il s’agit d’un récit de vie authentique où l’auteure livre ses émotions les plus nobles (ce roman est écrit de son point de vue, à la première personne du singulier) mais aussi les mauvaises réactions qu’elle peut ressentir et qu’elle essaye de freiner pour ne pas heurter son invité.

Elle ne comprend pas pourquoi Reza-Daniel donne de grosses sommes d’argent à d’autres migrants, des quasi-inconnus alors qu’il pourrait les économiser pour lui seul.

Le récit de cette année particulière est structuré par des chapitres aux titres forts : Putain de camion, Qu’as-tu fait de ton frère, Le Prince à la petite tasse, Ma maman, Sourire rézien, Fluctuat nec mergitur…, émaillé par les réflexions enfantines des deux petits garçons qui parlent avec leur cœur. Ils  s’insurgent que leur  « grand frère d’adoption » n’ait pas eu la même enfance insouciante que la leur.

On reconnaît ici le talent littéraire de cette écrivaine aguerrie (elle a déjà publié une dizaine de romans).

Elle recourt à la poésie dans ce journal : la beauté des mots, des rimes rend alors plus supportable la réalité face aux situations terribles dont Reza leur fait part : le racisme, la peur  d’avoir perdu sa famille à tout jamais, l’avenir…

Emilie de Turckheim sait rendre romanesque les petites choses du quotidien sans tricher, ni embellir la réalité.

Un passage du livre m’a particulièrement marqué. C’est celui où Reza annonce à ses hôtes qu’il va bientôt les quitter : il a trouvé un travail dans un lycée assez loin en banlieue.

Il explique difficilement au couple que le directeur du lycée qui ne le connaît que depuis une semaine, a décidé de lui faire confiance comme eux il y a neuf mois,  en lui procurant un logement gratuitement.

Ma note :

5/5 sardines

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C’est un grand livre que j’ai bien envie de relire très prochainement. C’est un récit de vie qui incite à retrouver la fraternité, cette valeur républicaine essentielle qui s’est égarée en chemin.

Chacun a une âme princière quand on décide de tendre la main, offrir son hospitalité malgré ses peurs !

La chorale des dames de Chilbury, la musique plus forte que la guerre !

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Je l’ai repéré grâce à la chronique d’un libraire, Stanislas Rigot de la librairie Lamartine dans l’émission de télévision Télématin. Il est évident que La chorale des dames de Chilbury est le roman coup de cœur de bon nombre de libraires compte tenu des nombreuses vidéos sur le web .

Je vous partage celle du libraire de la Griffe noire, Gérard Collard. J’ai failli faire une ridicule danse de la joie quand je l’ai trouvé sur la table des nouveautés de la bibliothèque Marguerite Duras, d’autant que j’ai eu beaucoup de mal à trouver un bon roman à lire ces trois derniers mois.

Il a tous les bons ingrédients pour conquérir son public : un titre qui suscite la curiosité, c’est un roman historique qui se déroule durant la Seconde guerre mondiale, cela parle de solidarité féminine dans l’épreuve et le chant transcende la tragédie….

Enfin, la couverture signée Neil Gower est un vrai petit bijou artistique : des notes de musique, un petit village verdoyant en proie aux flammes d’un bombardement….

La chorale des dames de Chilbury

Jennifer Ryan

2018, Albin Michel

462 pages, 22€

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Le résumé

Chilbury, Kent, 1940. Les hommes sont partis au front, mais une dizaine de femmes du village reprend la chorale comme fait de résistance contre cette guerre qui bouscule leurs vies, les maintient dans une angoisse permanente d’apprendre la mort d’un fils, d’un mari…

Sous la forme de lettres ou de journal intime, ce roman historique est une galerie de portraits de femmes de tous les âges et de toutes les conditions sociales qui vont ne plus être les mêmes personnes au cours de la guerre.

Il y a Prim, la chef de choeur qui montre la voie à ses choristes, Madame Tilling, le personnage central de ce roman, une veuve peu assurée qui va prendre de l’envergure. Elle est une infirmière responsable, avec un grand cœur chrétien qui va prendre soin de ces femmes  même de la plus coriace Edwina Paltry ou la plus délurée Vénetia, la fille du général tyrannique fou furieux…

C’est un roman historique passionnant qui retrace l’histoire de l’Angleterre pendant la seconde guerre mondiale à travers les anecdotes personnelles de la grand-mère de l’auteure et c’est cela qui fait toute la saveur de ce roman : on sent une profonde authenticité dans son écriture.

Mon avis :

Les dames de Chilbury ont du répondant : ça barde dans les chaumières au moment du thé et des scones. C’est tout sauf une histoire de dames patronnesses plan-plan… Il y a des vrais méchants qui montrent toute leur noirceur : Edwina, le général, Etsie, le soupirant éconduit Henry….et des vrais gentils comme le colonel Mallard, Mrs Tilling, Venetia…

L’ intrigue est très bien construite, on se prend au jeu de la lecture dès le début du roman.

Je suis épatée par le talent de ces auteurs anglais comme Jennifer Ryan, Helen Simonson (l’auteure de La dernière conquête du major Pettigrew) ou encore Mary Ann Schaffer (Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates) qui parviennent à toucher la corde sensible des émotions avec des personnages d’une grande humanité ou bien d’une grande médiocrité.

Car c’est dans l’adversité que se révèlent les noirceurs ou la beauté de l’âme humaine : voila comment je résumerai ce roman pour vous donner envie de le lire.

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Voici une petite liste de mes films, séries et romans so british favoris. Cela se déguste avec une bonne tasse de thé Mariages frères et des petits sablés au pain d’épice glacés au sucre. Miam !

Downtown Abbey

Comme tout le monde, j’aime cette série historique qui raconte la vie d’une famille d’aristocrates qui possède un immense domaine en Angleterre avec un superbe château en 1912, après le naufrage du Titanic. Cette série relate la vie en Angleterre entre 1914 et 1935 avec beaucoup de justesse historique. Un régal devant les costumes des années Folles, le carré garçonne de lady Mary….

The crown

Cette série, je l’ai dévorée en trois semaines tellement j’étais emballée. J’ai même eu la chance de ne pas attendre un an avant la deuxième saison puisque je l’ai découverte peu de temps avant une nouvelle diffusion sur Netflix. Les monarchies ce n’est pas mon truc du truc mais cette Elisabeth on s’y attache vite…. Claire Foy est une grande actrice avec ses grands yeux candides, sa maladresse timide. Elle va prendre du galon face à Churchill, ses conseillers et même son époux… La détresse psychologique de sa sœur, la princesse Margaret, m’a émue mais j’ai particulièrement aimé l’épisode avec l’évangéliste Billy Graham, ou encore la scène de danse avec le dirigeant nigérian, véritable exercice diplomatique pour la reine…

La dernière conquête du major Pettigrew

La derniere conquete du major Pettigrew

C’est mon roman feel good coup de coeur, celui que je recommande à tous les Kubers qui cherchent un bon roman feel good. Helen Simonson a vraiment réussi son pari avec ce premier roman. Je vous laisse le soin de découvrir ma chronique ici car ce roman m’a vraiment emballée : je pense sérieusement à le relire….

Le diable habite à Nothing Hill

Ce n’est pas le roman du siècle, c’est même de la littérature de poulettes clairement assumée mais j’avais passé un bon moment de détente au bord de la plage avec ces personnages très caricaturaux. J’avais surtout beaucoup aimé les couvertures des livres de cette trilogie et les querelles de territoires de ces nouveaux riches…

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Une envie d’aller visiter Guernesey grâce à un roman…

J’aime les adaptations littéraires au cinéma : le film Le cercle littéraire de Guernesey est sorti le 13 juin au cinéma, la plupart de mes amies ont beaucoup aimé ce livre et le casting du film regroupe beaucoup d’acteurs de Downton Abbey, la série à la mode ces dernières années.

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Malgré toutes ces bonnes raisons, j’ai bien failli passer à côté de ce livre car j’ai beaucoup de mal avec les romans épistolaires. Cependant, la modernité du personnage de Juliet dans le Londres d’après guerre en 1946 m’a bien encouragée à poursuivre ce roman qui s’est avéré être une lecture passionnante.

Il faut dire que la bande annonce du film m’a bien aidée pour imaginer les personnages et m’ y retrouver dans tous ces échanges de correspondances : il y a une dizaine de personnages principaux et secondaires. Ils se sont entraidés et soutenus pendant la Seconde guerre mondiale à travers un cercle littéraire.

C’est d’ailleurs cette solidarité d’un groupe d’amis sur une île envahie par les Nazis qui est le sujet central de ce livre.

Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates

Mary Ann Schaffer et Annie Barrows

Editions Nil

2009, 416 pages

20€

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Le résumé : 

Londres,1946. Une jeune femme, Juliet Ashton, écrivain à succès, cherche une nouvelle idée de roman auprès de son éditeur et ami Sydney.

Une lettre venue de Guernesey va changer le cours de sa vie : un habitant cherche à se procurer des livres comme son île a été  en pénurie de vivres, de papier, de bois, pendant l’Occupation allemande.

De fil en aiguille, Juliet va faire la connaissance de l’ensemble des membres du cercle littéraire des amateurs de patates via leurs lettres, puis elle va les rejoindre pour écrire un livre sur leurs conditions de vie pendant la guerre.

Peu à peu, son livre va s’orienter vers un point de vue : une biographie d’Elisabeth Mac Kenna, une jeune infirmière intrépide. La création du cercle littéraire vient d’un de ses mensonges à l’ennemi car ses amis et elle n’avaient pas respecté l’heure du couvre-feu.

Ses nombreux autres actes de bravoure la mèneront pourtant à sa perte puisqu’elle sera déportée pendant la guerre. En 1946, elle est toujours portée disparue et les membres du cercle littéraire prennent soin de sa petite fille Kit, née de son histoire d’amour avec un officier allemand.

Mon avis :

Pour moi, ce roman est passionnant car il est porté par une héroïne à la personnalité forte et sans concession : Juliet. Le choix de Lily James à l’écran est une excellente idée, elle est jolie et pas un brin pimbêche.

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Au début du roman, c’est une demi-mondaine qui s’amuse dans les réceptions et les cocktails littéraires à Londres. Mais sa correspondance avec les habitants de Guernesey va révéler une femme de cœur, sensible aux autres et fidèle à ses convictions. C’est une femme indépendante, qui gagne sa vie sans dépendre d’un homme grâce à son travail intellectuel. Cela nous change de Lady Mary de Downton Abbey, une éternelle rentière.

Elle évolue dans le Londres intellectuel d’après guerre, qui se relève économiquement des bombardements mais qui vit toujours avec les rationnements, le deuil de sa maison totalement détruite…

Cette période historique est très bien décrite dans la série de Netflix The crown, notamment la saison 2 qui raconte la tentative de trahison du frère du roi d’Angleterre Edward VII et sa femme Wallis Simpson qui complotaient avec Hitler.

Ensuite, ce roman est une source historique pour comprendre la situation politique des îles anglo-normandes pendant la guerre : ils parlent anglais, leur monarchie est anglaise mais ils ne font pas formellement partie du Royaume -Uni.

L’Angleterre n’a pas envoyé d’armée les défendre contre les Allemands mais elle a évacué rapidement les enfants, un moment très émouvant du livre. Allemands comme habitants de l’île ont rapidement soufferts de la faim, de la pénurie de combustibles, les conduisant à se conduire de façon primaire pour survivre mais d’autres ont aussi choisi de s’entraider par humanité.

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C’est le grand point fort de ce livre, il montre toutes les nuances de l’âme humaine. Deux ans après la fin de la guerre, les habitants racontent à Juliet les pires travers de méchanceté des Allemands mais ils louent aussi les qualités humaines d’autres soldats qui ont oublié un moment la guerre pour tendre la main à l’autre. Le portrait de l’officier allemand Christian est vraiment réussi.

On soulignera le talent de l’auteure Mary Ann Shaffer qui a imaginé des personnages plein d’humanité, de différents âges et de différents milieux sociaux qui vont s’entraider. Elle est morte quelques mois avant la parution du livre et en a confié la fin de l’écriture à sa nièce Annie Barrows. C’est donc un roman écrit à quatre mains.

Pour la petite histoire, l’édition française est éditée par les éditions Nil, une maison d’édition qui publie de la littérature de qualité à l’image du premier roman d’Helen Simonson, La dernière conquête du major Pettigrew, mon coup de coeur de l’automne dernier.

Ma note : 4/5 sardines

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Il faut un peu s’accrocher au début de la lecture pour entrer dans l’histoire mais les souvenirs de guerre des habitants de l’île suscitent vite toute l’attention du lecteur, surtout que l’auteure a utilisé la technique très efficace du flash-back.

Elle a vraiment choisi un excellent sujet d’Histoire car ces îles ont vraiment vécu un contexte politique et social très particulier pendant la guerre. C’est l’un des meilleurs romans sur la Seconde guerre mondiale que j’ai lu.

Seul petit bémol pour moi : le personnage de la bigote dont je ne me souviens plus le nom. C’est une commère malfaisante qui dénigre les membres du cercle littéraire auprès de Juliet pour la décourager dans son projet. Je ne doute pas que ce genre de créatures existent mais elle donne vraiment une mauvaise image des chrétiens.

Je donne donc la note de 4 sardines à ce roman qui a enchanté mes longs trajets de métro cette semaine. Une des tirades de la dame bigote a d’ailleurs beaucoup résonné dans ma tête : « Ces gens là n’auraient jamais ouvert un livre si l’île n’avait pas été occupée par les Allemands » Et alors?.

 

Indéterminés, la trajectoire sociale des Stagiaires de Samantha Bailly

Ces deux dernières semaines, j’ai choisi dans mes lectures, deux suites de romans que j’avais beaucoup aimé : Sauveur et fils saison 4 de Marie-Aude Murail ainsi qu’Indéterminés de Samantha Bailly. Quand on s’attache aux personnages d’un roman, c’est annonciateur d’une bonne lecture.

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J’ai vraiment aimé l’histoire des Stagiaires, le premier tome car les personnages sont vraiment décrits avec beaucoup de psychologie, contrairement aux nouveaux romans estampillés feel good où les personnages sont tellement caricaturaux que je n’ai absolument pas envie de passer 200 pages en leur compagnie.

C’est une trilogie : Les stagiaires , A durée déterminée et Indéterminés, mais comme j’en ai un peu ma claque des CDD à répétition, je n’ai pas attendu de lire le deuxième volume, je me suis jetée sur Indéterminés en grand format, que les éditions JC Lattès m’ont gentiment envoyé !

On y retrouve la consciencieuse Ophélie qui a été catapultée directrice de la communication de Pyxis mais patatras la sympathique start-up chaleureuse a été croquée par un gros requin du jeu-vidéo… Arthur Mareuil, le beau garçon des beaux quartiers revient au bercail : on l’embauche dans ce processus de fusion-acquisition pour dégraisser la masse salariale, augmenter la rentabilité.

Samantha Bailly poursuit sa narration originale à deux voix : celles d’Ophélie et d’Arthur s’alternent toujours à chaque chapitre. Ils approchent la trentaine et ont radicalement évolué depuis leur période de stage il y a cinq ans : Ophélie a fait une croix sur l’engagement amoureux alors qu’Arthur s’est lassé de son papillonnage adultérin…

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C’est un peu le sens du titre Indéterminés comme la référence au CDI mais aussi cette période d’entre-deux où l’on recule comme on peut face à l’engagement professionnel, l’engagement conjugal…

Ce roman est aussi une critique subtile et précise de l’entreprise : Ophélie sacrifie beaucoup de son temps, de sa personne pour son poste mais en retour, son entreprise ne lui assure aucune sécurité malgré son CDI.

Bon nombre d’articles de société jugent les employés de la génération Y comme versatiles, opportunistes et peu attachés à l’entreprise dans laquelle ils restent peu.

Ce n’est pas le cas des personnages de Samantha Bailly comme Ophélie ou encore Alix qui s’impliquent personnellement dans leur travail avec conscience professionnelle.

Le discours du directeur éditorial de Pixis qui veut profiter de la naïveté de deux jeunes illustratrices de manga talentueuses m’a rappelé la récente lutte #Paye ton auteur à Livre Paris.

Samantha Bailly est présidente de la charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, elle a mené avec d’autres auteurs une intense bataille médiatique sur les réseaux sociaux pour défendre les droits des auteurs à Livre Paris.

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Autant, avec ce premier volume, Samantha Bailly décrivait une période de la vie de tout jeune diplômé, autant Indéterminés montre la solitude et la pression d’employés qui ont affronté la précarité économique le temps d’un stage, se sont pliés à toutes les exigences de leurs supérieurs pour décrocher un contrat de travail et qui continuent de vivre dans la peur de perdre leur emploi s’ils haussent un peu trop la voix ou s’ils ne veulent pas bafouer leurs valeurs professionnelles.

C’était vraiment un excellent moment de lecture, que je vous recommande. Je vais même aller chercher en librairie le tome 2 A durée déterminée tellement j’aime ces personnages et leurs questionnements personnels.

Samantha Bailly est une auteure à suivre car comme Marie-Aude Murail, elle sait décrire les sentiments contradictoires que ressentent ses personnages dans une même phrase et apporter aux lecteurs des portraits psychologiques passionnants.

Je sais qu’une adaptation cinématographique est en négociation tant ce roman est passionnant : il arrive à rendre romanesque le stage en entreprise, c’est dire !  Dans mon imagination de lectrice , je voyais bien Alix sous les traits de Marilou Berri et Arthur Dupont pour jouer Arthur. Par contre, Ophélie est une énigme pour moi. Et vous qu’en pensez-vous?

SardinesPssst ! Si cet article t’a plu, rejoins le club des abonnés du blog  ou plutôt la boite à sardines pour qu’on chante tous ensemble la chanson énervante de Patrick Sébastien : « Ah qu’est ce qu’on est serré, au fond de cette boite, chantent les sardines ».

C’est en haut à droite !

 

Nos âmes la nuit, l’intimité à l’aube de la vie

J’aime les adaptations de romans américains au cinéma. J’avais eu un vrai coup de cœur pour le roman Promenons-nous dans les bois de Bill Bryson, un road-trip de deux vieux messieurs sur un trail ardu dans un coin montagneux des Etats-Unis. J’aime beaucoup le jeu de Robert Redford et j’ai aimé son rôle de Louis dans son dernier film Nos âmes la nuit.

Je suis assez admirative du cinéma américain actuel qui place ses anciens en tête d’affiche : Robert Redford, Jane Fonda, Michael Caine et Morgan Freeman, Robert de Niro… La vieillesse est beaucoup plus caricaturée dans le cinéma français.

La vieillesse, le veuvage sont les deux thèmes majeurs de ce magnifique roman, assez court (180 pages) : Nos âmes la nuit de Kent Haruf, un auteur américain originaire du Colorado. Il est mort quelques mois avant la parution de ce livre en 2015.

Nos âmes la nuit

Le résumé :

Addie et Louis sont de vieux voisins dans une petite ville du Colorado. Un soir, Addie vient toquer à la porte de Louis avec une demande inédite et osée : accepterait-il de venir la nuit dormir avec pour affronter la solitude de la nuit à l’aube de leur vie?. C’est l’histoire d’une profonde complicité amicale et sentimentale qui se construit sous les yeux de leurs enfants adultes mais aussi de cette petite ville cancanière.

Mon avis :

J’ai eu un véritable coup de cœur pour ce livre et le style de son auteur que je ne connaissais pas du tout. Il a su saisir la réalité sociologique de ces retraités.

Au début de leur arrangement peu commun, ils sont un peu empruntés. Partager sa chambre, dormir ensemble est beaucoup plus intimidant et intime que d’avoir une relation sexuelle avec un inconnu.

C’est tellement évident que de nombreux sociologues et anthropologues ont étudié la question. Histoires de chambres de Michelle Perrot étudie cet espace très particulier  mais surtout Jean-Claude Kauffmann avec ses ouvrages Le lit, tendre guerre et Premier matin, la construction d’une histoire d’amour.

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Rien n’est plus intimidant de se réveiller ensemble, se chuchoter des confidences dans le noir et pourtant c’est comme ça que ces deux retraités vont se soutenir mutuellement dans leurs relations avec leurs enfants, leur estime de soi par rapport à leurs mariages révolus.

Ils sont un peu rouillés les premiers jours  avec un enfant rivé à son écran. Ils prendront soin de lui pendant quelques mois. Ils vont donner tout simplement de l’amour à Jamie, le petit-fils d’Addie que son père lui a confié parce que rien n’allait plus avec la maman du petit garçon.

Le Guardian dit de ce livre : « Nombre de romans évoquent la quête de l’amour mais celui-ci est illuminé par sa présence ».

Ce livre montre les remarques narquoises des autres habitants de la ville qui indignent leurs enfants et les incitent à faire la leçon à leurs parents au nom du qu’en dira t’on?. La sexualité des veufs est taboue, ce livre le prouve.

Peut-on recommencer à aimer quand on est veuf?. Faut-il qu’ Addie et Louis endurent seuls leur solitude parce que la personne à qui ils ont juré fidélité toute une vie est décédée?. Le lecteur est alors témoin de leur souffrance quand on essaie  de les séparer à la fin du roman.

« Si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien  » écrit l’apôtre Paul dans l’épître aux Corinthiens.

Ma note :

5/5 sardines

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Je vous recommande ce livre qui raconte plusieurs solitudes : celle d’ Addie, de Louis, celle du petit-fils tiraillé entre ses parents qui l’ont laissé chez sa grand-mère, celle de la petite chienne recueillie par l’enfant, celle de la vieille dame sans famille Ruth… et comment ces gens s’entraident par amour, sans avoir de liens familiaux particuliers.

C’est un magnifique livre sur l’engagement amoureux.

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Je me lance dans un doctorat feel good books

Ca y est j’ai trouvé ma lecture cold winter à la librairie Le genre urbain, rue de Belleville.

Ce sera La pâtissière de Long Island, un feel book qui croise deux histoires de femmes à des époques différentes. Elles sont de même famille et la transmission d’une recette de pâtisserie va transformer leurs vies…

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On parle beaucoup de biblio thérapie, je n’irais pas jusque la non plus mais d’avoir choisi ma lecture de vacances d’hiver pour prendre l’avion pour Sofia, ça donne un avant-goût de vacances.

Il se trouve que mon amie Marion a reçu le même livre pour Noël. Elle a eu un peu le même avis que moi : une lecture sympathique mais qui ne restera pas dans les annales.

J’ai toute une théorie sur les feel-good books.

L’héroïne est souvent une jeune femme célibataire d’une trentaine d’années, qui cherche un sens à sa vie amoureuse mais aussi à sa vie tout court (vaste programme).

Elle tient un commerce de proximité créatif : libraire, fleuriste ou encore pâtissière. Les desserts, ça donne faim aux lecteurs et c’est plus vendeur que employée de pompes funèbres ou contrôleuse de gestion.

Une des histoires qui m’avait le plus touchée est l’adaptation du livre Julie and Julia de Julie Powell avec Meryl Streep et Amy Adams. Le sous titre du livre : sexe, blog et boeuf bourguignon emprunte les codes de la littérature de poulettes ou du feel-good mais le style était bien meilleur et cette autobiographie faisait preuve d’humour et d’auto-dérision.

Surtout c’était une histoire authentique qui rendait sympathique et attachante la narratrice. A force d’exploiter le filon du feel-good book, les éditeurs vont casser la corde car les vrais lecteurs aiment les histoires de qualité avec une vraie situation initiale et des portraits psychologiques des personnages plus fouillés.

Et si c’était un bon feel good ce n’était pas un feel-good qui s’ignore finalement ?. Si vous n’arrivez pas encore à cerner ce qu’est le feel-good, l’exemple parfait est la série Fais pas ci, fais pas ça de France 2 (ma série phare).

Mon avis :

La-Pâtissière-de-Long-IslandJe me suis vraiment ennuyée les cent premières pages de ce roman, quitte à me demander si je n’allais pas carrément abandonner ma lecture.

Cette fameuse Marie, immigrée allemande dans les années 1930 était sympathique mais son personnage m’a rapidement lassée. Comme d’habitude, je déplore une structure initiale désolante qui n’installe pas du tout l’histoire et ça ne décolle pas.

Le portrait psychologique de cette fille était ennuyeux comme la pluie. J’ai commencé à m’y intéresser qu’à partir de sa rencontre avec Walter, le mauvais garçon riche qui la courtise platoniquement.

Pourtant l’idée de départ était bonne : le récit de vie de trois jeunes émigrés qui noient leur errance identitaire dans le travail pour percer aux Etats-Unis pendant la prohibition. L’auteure raconte l’émergence des idées nazies à travers le personnage d’Arthur, l’amoureux transi de Marie venu la chercher depuis l’Allemagne.

L’intrigue autour de la recette secrète du cheese-cake était vraiment faible, certains dialogues étaient aussi niais qu’un conte de fées. Le seul passage qui m’a vraiment passionnée est celui où Rona, sa petite-nièce ouvre un salon de thé en Frise-orientale et comment elle renoue avec les origines juives de l’aïeule Freida, celle qui a transmis la recette à Marie.

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L’auteur montre que le cheese-cake américain découle d’une longue tradition sucrée, un héritage juif qui a longtemps voyagé en Europe.

Pour conclure, je dirai que ce livre était moyennement nul et qu’il n’ apporte rien de bien particulier à la littérature. Je lui mets même un vrai carton rouge de valoriser le reiki et l’occulte à travers le personnage de la voisine new age de Rona. C’est pas bien feel-good tout ça.

Je donnerai à ce roman la note d’une seule sardine.

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Heureusement, j’ai aussi trouvé grâce au club de lecture Mango & Salt sur Facebook, un roman talentueux adapté au cinéma sur Netflix (vive Netflix !) : Nos âmes la nuit de Kent Haruf, collection Pavillons, éditions Robert Laffont.

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C’est l’histoire de deux veufs qui vivent dans une petite ville : Holt, à l’intérieur des terres aux Etats-Unis. Un soir, Addie (Jane Fonda) vient proposer à Louis (Robert Redford) de venir dormir le soir avec elle car les nuits sont longues quand on souffre de la solitude à l’aube de sa vie…

Jane Fonda et Robert Redford ont passé le cap des 80 ans et ce sont les têtes d’affiche d’une comédie romantique tendre et passionnante. Comme quoi le jeunisme au cinéma, dans la littérature ou dans la vie d’entreprise a ses limites….

Je vous en reparle très vite dans un prochain article…

Les stagiaires, le roman d’apprentissage de la génération Y.

J’ai découvert ce roman grâce aux chroniques télé de Bulle Dop dans l’émission C’est au programme sur France 2.

Les stagiaires

Samantha Bailly, éditions Milady

2014 – 350 pages

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Je venais de terminer un très mauvais livre Les gentilles filles vont au paradis, les autres là où elles veulent : un vrai désastre littéraire. Une héroïne insupportable, une intrigue faible et fade, des personnages secondaires insipides… bref du feel-good tellement marqueté qu’il écœure les lecteurs compulsifs comme moi. J’ai envie d’écrire un article sur les feel-good books dans un prochain billet.

Donc, j’avais un peu peur que cette histoire de stagiaires soit superficielle et caricaturale. Et bien non, tout au contraire, c’est surement le roman le plus profond que j’ai lu : son analyse psychologique des personnages est très poussée.

Les stagiaires est tout sauf un feel-good book : il n’ y a pas d’happy end comme dans une comédie romantique (je n’en dirai pas plus…) C’est un véritable roman d’apprentissage dans un contexte tellement familier : le stage en entreprise.

Le résumé :

C’est l’histoire de six stagiaires : Ophélie, Hughes, Vincent, Arthur, Alix et Enissa. Provinciaux ou Parisiens, ils viennent de milieux sociaux différents pour acquérir une expérience professionnelle à Pyxis, la boite de jeux vidéos. Qui sera finalement embauché? Quel tournant donner à sa vie personnelle?

C’est un roman d’apprentissage à travers le stage, un moment charnière de la vie que nous avons tous vécu.

Mon avis :

Samantha Bailly a choisi un mode narratif très efficace : au fil des chapitres, ce sont les deux personnages principaux Ophélie et Arthur qui racontent à la première personne du singulier, les situations de vie du groupe : quand ils se retrouvent entre eux à la cafétéria ou lors de leurs fêtes ou bien quand ils sont confrontés à leurs supérieurs dans l’open space de Pyxis….

L’organigramme de l’entreprise sert de situation initiale pour commencer la lecture et j’ai trouvé ça très bien vu. Je ne déteste rien de plus qu’un roman qui ne me laisse pas faire connaissance avec les personnages qui vont m’accompagner les 300 prochaines pages.

Je me suis vraiment attachée à eux dans ce roman, aucun n’est stéréotypé. Que ce soit Enissa, la jeune fille aux seins refaits dont le langage rappelle celui d’une Nabilla. Derrière sa superficialité, Enissa cache un regard désabusé sur elle-même, elle se met une forte pression pour réussir dans la vie. Quant à Alix, la grande fille ronde totalement geek est la plus accueillante du groupe. Fine psychologue, elle sait discerner qui porte un masque et sera la bonne personne pour écouter Ophélie et la conseiller.

Le personnage le plus intéressant est sans conteste Arthur. Petit-bourgeois issu d’une grande école de commerce, il profite de cette année de césure pour explorer un monde qui le fascine hors du chemin prestigieux tout tracé par sa mère, ses amis et son milieu social.

Il côtoie des jeunes de son âge comme Ophélie qui doivent réussir leur entrée sur le marché du travail sans les relations de leurs parents, ni aide financière. L’argent n’est pas un souci pour lui.

Pourtant c’est lui le personnage le plus tourmenté qui se réfugie dans l’alcool, la drogue et l’adultère car il a peur de construire son avenir. Alors il le détruit et fait de sacrés dégâts autour de lui… Même les filles les plus raisonnables et responsables se laisseront attirer dans ses filets…

Ma note :

5/5 sardines

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J’ai vraiment été emballée par ce roman car il raconte la recherche identitaire, la quête du grand amour de jeunes adultes qui se construisent dans un contexte de précarité professionnelle et économique.

J’ai découvert une auteure très talentueuse : Samantha Bailly. L’épilogue du roman est très surprenant par ses nuances et sa tendresse. C’est une auteure que je vais suivre par la suite, c’est évident. Elle a déjà écrit une dizaine de livres, principalement de la fantasy (tout ce que je n’aime pas du tout) mais une telle profondeur d’approche psychologique de ses personnages donne envie de lire.

Margaud liseuse, booktubeuse réputée a fait  le tour de l’oeuvre littéraire de Samantha Bailly et voila ce qu’elle en pense :

Je viens de découvrir qu’il existe une suite aux stagiaires : A durée déterminée… je crois que je vais prolonger le stage de cette auteure talentueuse !.

Tout un été avec les personnages de Mitch Albom

20170807_080934Cet été, j’étais à court de romans pour la plage alors je suis aller fouiner dans la case de mon mari dans notre bibliothèque.

J’y ai trouvé les romans de l’auteur américain Mitch Albom qui m’ont fait rire, sourire, presque pleurer tant ils étaient passionnants.

Ces romans et leurs personnages furent de fidèles accompagnateurs pendant les longs trajets en voiture ou les heures d’attente dans les aéroports cet été.

J’ai commencé ma lecture avec Pour un jour de plus, un roman qui m’a passionnée pendant les dix heures de route d’un long trajet Paris- Valence en voiture le 14 juillet.

Pour un jour de plus

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Le résumé :

C’est l’histoire de Charley, un ancien joueur de base-ball alcoolique. Il retourne dans la ville de son enfance pour en finir avec la vie. A la suite d’un accident de voiture, un événement surnaturel lui permet de gagner quelques jours perdus avec sa mère disparue. Il va alors actionner la machine à remonter le temps pour redonner du sens à sa vie, grâce à toutes les leçons de vie que sa mère lui a inculqué pendant sa jeunesse.

Mon avis :

J’ai beaucoup aimé la structure de ce livre avec l’alternance de chapitres : les fois où ma mère m’a défendu, les fois où je n’ai pas défendu ma mère…. Mitch Albom raconte les discriminations morales vécues par une mère divorcée dans les années 1950 et 1960.

Ainsi, le narrateur fait l’éloge funèbre de sa mère, son héros, à sa manière. C’est un thème littéraire rare et original, cela m’a rappelé le sujet du livre La couleur des sentiments dans l’Amérique glorieuse et florissante de l’après-guerre.

 

La dernière leçon

510uWqpXr-L._SX210_Ce livre a été difficile à lire car il traite de la déchéance physique, la perte de la dignité, l’indépendance et tout ce que vole la maladie à quelqu’un qui meurt à petit feu.

Mitch Albom retrouve Morrie, son ancien professeur d’université qui participe à une émission de télévision un peu sensationnelle pour toucher le cœur des gens.

Sous forme d’entretiens sur le sens de la vie, Morrie va transmettre à Mitch le goût de vivre.

Lui, le petit immigré juif, orphelin de mère pendant la Grande dépression, qui a tant manqué d’amour pendant son enfance va en offrir à grands bouillons aux inconnus qui lui écrivent des lettres après l’émission de télévision qui se déroule chez lui. C’est un très beau livre sur la préciosité de l’amour.

Après Morrie, son ancien professeur d’université, Mitch Albom retrouve un autre mentor de sa vie : Albert , le vieux rabbin qui s’occupait de son éducation religieuse quand il était enfant dans le roman autobiographique Le vieil homme qui m’a appris la vie. 

Le vieil homme qui m’a appris la vie

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Ce roman m’a particulièrement touché car il croise les trajectoires de deux hommes de foi  :  Al, le rabbin et Henry, l’ancien caïd new-yorkais devenu pasteur à Détroit durant la dramatique crise des subprimes de 2008.

Mitch retrouve le rabbin qui lui fait une demande déroutante : passer du temps ensemble pour écrire un jour son éloge funèbre.

Al lui raconte son enfance durant la Grande dépression, le deuil d’une de ses filles, ses expériences avec Dieu…

C’est un magnifique livre sur la foi qui m’a vraiment marquée.

Et enfin mon été s’est achevé avec un livre unique, déroutant mais tellement talentueux :

La guitare magique de Frankie Presto

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C’est un gros pavé qui vous tient en haleine pendant toute une semaine. Mitch Albom a imaginé une fiction fantastique qui débute dans les heures sombres de l’Espagne franquiste.

Le narrateur est la musique, elle s’est penchée comme une fée sur le berceau de Francisco pour lui donner un don unique. Francisco sera un guitariste de génie, ce don lui sauvera la vie à de multiples reprises.

Il aura une vie hors norme en gagnant très jeune l’Amérique pour collaborer avec les  plus grands artistes des années 1950 et 1960. Ce livre montre le grand talent de Mitch Albom et sa maîtrise des flash-backs qui ne perdent jamais en route ses lecteurs.

 

Les chapitres s’alternent entre récit biographique et courte interview de musiciens qui ont voulu rendre hommage à Frankie lors de ses funérailles.

Ainsi Mitch Albom réunit dans ce livre plusieurs caractéristiques qui reflètent son oeuvre littéraire :

–  le recours aux souvenirs du passé pour se construire en tant qu’individu

–  l’hommage aux mentors lors d’un éloge funèbre

–  le thème incontournable de la transmission du savoir, des valeurs par un professeur de guitare, un professeur d’université, un vieux  rabbin, une maman divorcée…

Désormais, je coche les romans de Mitch Albom que j’ai déja lu, je me dresse une liste des livres qu’il me manque et je scrute le site web de son éditeur français s’il publie un nouveau roman.

Alors à vous de vous laisser séduire par son écriture…

 

Thérapie de groupe

Grâce à la lecture d’un blog littéraire vraiment génial : My pretty books, j’ai découvert une trilogie écrite par une auteure que j’affectionne de longue date.

C’est simple, j’ai dévoré les trois livres en une semaine, cette série m’a fait arriver deux heures avant dans une salle d’attente pour lire tranquille mon livre, et j’ai fait le tour des librairies du quartier tout une après-midi car je voulais absolument lire la fin de cette trilogie attendrissante.

Sauveur et fils, saisons 1, 2 et 3, Marie Aude Murail

Collection Medium, Ecole des loisirs

de 12 à 16 ans

300 pages- 17€

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En moins d’un an, Marie-Aude Murail nous régale avec trois épisodes de Sauveur et fils où patients adolescents et leurs parents se succèdent au cabinet à domicile du psychologue Sauveur Saint-Yves à Orléans. Une fresque de portraits où s’entrechoquent fatalement vie privée, confidentialité thérapeutique et questions de société.

marie aude murailMarie-Aude Murail est une auteure emblématique de la littérature jeunesse depuis 30 ans. Elle aime écrire des histoires de fratries comme Oh boy ! ou Simple, des romans qui s’adressent aussi bien aux adolescents qu’aux adultes.

Chacun de ses livres reçoit régulièrement des prix de littérature. Sauveur et fils, saison 1 n’échappe pas à la règle car il a reçu le prix Pépite décerné en 2016 par France Télévisions au dernier salon du livre jeunesse de Montreuil.

Marie-Aude Murail a mis un peu d’elle-même dans cette fiction qui se déroule à Orléans où elle vit et elle s’est rappelée de ses souvenirs d’une année passée aux Antilles dans sa jeunesse, pour construire le personnage de Sauveur.

Ce grand et bel homme de la Martinique suscite la curiosité des mamans à la sortie de l’école (l’une d’elles, Louise, va même tomber amoureuse de lui) quand il vient chercher son fils Lazare, 8 ans. Sauveur Saint-Yves est veuf. Lazare est un petit garçon métis dans une ville française de taille moyenne : Orléans.

Le multiculturalisme est présent à l’école (la saison 2 voit l’arrivée d’une petite fille chrétienne d’Irak) ou au cabinet de Sauveur mais on note un décalage sociétal avec la capitale Paris : la parole raciste des parents assumée par réflexe xénophobe, la honte et la résignation des parents à envoyer leur enfant consulter…

« – Il m’a demandé si je voulais garder son petit et, comme j’ai rien contre les Noirs, j’ai dit oui, ajouta Nicole, pensant édifier Louise avec ses bons sentiments. Je sais pas si c’est dans votre goût, les mélanges de race, mais je trouve que le petit Lazare est pas vilain de figure. Quand ils ne sont pas TROP noirs, ça va.
Louise écoutait, tétanisée par cet étalage de racisme et de bonne conscience. 
– Ce qui est dommage, c’est ce nom, poursuivit la nounou.
– Ce nom ?
– Mais « Lazare » ! Faut dire aussi que le père s’appelle Sauveur. Mon mari, il avait connu un nègre qui s’appelait Fêtnat parce qu’il était né le jour de la fête nationale ! Enfin, ça me gêne pas, moi. Ils font ce qu’ils veulent. Du moment qu’ils restent chez eux. Mais là, à Orléans, il y en a trop. On n’est plus chez nous. Je dis pas ça pour le docteur Sauveur, il paye ce qu’il doit, il est propre, y a pas de souci. Des Noirs, y en a des biens.  »

Un extrait de Sauveur et fils, tome 1

Le racisme, la filiation, la famille recomposée et le divorce, l’identité, le cyber-harcèlement ou les questionnements sur le genre à la puberté sont autant de thématiques abordées par Marie-Aude Murail.

Les trois romans suivent la même structure : chaque chapitre décrit une séance thérapeutique de Sauveur avec un patient. On suit l’évolution de la thérapie avec ses avancées et ses échecs. Notre humanité nous pousse à nous réjouir pour l’un des personnages qui se trouve libéré d’un secret de famille ou quand l’un des adolescents retrouve son père qu’il n’ avait jamais rencontré à cause de l’emprise de sa mère toxique.

 

A cette fresque de rencontres s’entrechoque l’histoire personnelle de Sauveur Saint Yves et son fils. La première saison parle du tiraillement identitaire dû à la couleur de peau et au métissage. Sauveur adopte un premier hamster à son fils pour qu’il se sente moins seul le soir quand il se laisse submerger par la fréquence de ses consultations.

Lazare le nomme Bounty (noir à l’extérieur, blanc à l’intérieur) comme le surnom difficile à porter pour Sauveur quand il était enfant en Martinique. Cela incitera le père à révéler à son fils les circonstances dramatiques qu’ils ont vécu quand Lazare était tout bébé.

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La seconde saison s’attache à montrer les défis de chacun pour s’intégrer dans une famille recomposée. Deux sœurs Margaux et Blandine sont des personnages récurrents des trois saisons. L’une se scarifie, l’autre est hyperactive car elle a peur pour sa sœur aînée. Leur histoire est particulièrement touchante car Marie-Aude Murail a su retranscrire la douleur d’enfants de divorcés face à leurs parents plus occupés à se renvoyer leur rancœur à la figure que de montrer de l’amour à leurs filles adolescentes.

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La troisième saison développe le thème de la relation au père, une thématique importante et peu développée dans les deux premières saisons : la plupart des adolescents qui viennent en thérapie sont accompagnés par leurs mamans qui cherchent des solutions pour que leurs enfants aillent mieux. Le père est soit réfractaire à l’idée d’une thérapie ou totalement absent de l’histoire.

L’enceinte, une explosion d’amour en milieu hostile.

Cet été, j’ai chroniqué des romans pour la plage autour de la sortie nationale du film La Cabane, adaptation cinéma du best-seller de Paul Young et j’ai découvert de nouveaux auteurs dont Eloïse Auvray !

Je vous raconte comment le temps d’un roman, je me suis essayée à la lecture d’un roman young adult : j’ai bien aimé !

L-enceinte

L’enceinte, tome 1 des aventures d’Amy

Eloïse Auvray, éditions MLK

2016-478 pages -18€90

9791096757015

Dès sa couverture, cet imposant roman intrigue. Cette jeune fille de dos c’est Amy, encore trop jeune pour être une adulte mais déjà trop marquée par les épreuves pour rester une enfant. Elle vit comme d’autres filles de son âge dans l’enceinte, une unité militaire froide et autoritaire dans laquelle les coups et les humiliations verbales sont légions.

 

C’est une communauté élitiste qui ne fait pas de cadeau aux plus faibles, les jeunes filles blindent leurs cœurs, font la guerre à leurs propres émotions, se méfient de leurs amies car l’entraide et la solidarité sont bannies dans l’enceinte. Et pourtant…même dans les endroits les plus sombres, dénués d’amour et dominés par la violence, Dieu règne.

Ce premier roman, édité par les éditions MLK (un des domaines d’activité de l’église MLK de Créteil) emploie les codes de la littérature young adult :  un roman d’apprentissage ponctué d’examens dans un pensionnat militaire où les jeunes adolescentes construisent leur identité. Eloïse Aufray aborde les thématiques de l’amitié, les relations sentimentales naissantes, le respect de l’autorité des adultes dans une société futuriste.

Elle a su tirer profit d’un procédé littéraire très efficace : démontrer que même dans les environnements les plus hostiles, on ne peut bannir l’amour. L’enceinte est l’exact opposé d’un feel good book, pourtant il porte le même objectif : redonner le sourire aux lecteurs face aux épreuves.

Ce roman s’adresse aux adolescents à partir de 13 ans mais aussi à un public adulte. Si vous avez passé comme moi l’âge des chicaneries de collégiennes, certains dialogues entre Amy et ses copines vous paraîtront superficiels.

Mais ce roman mérite de passer outre ce petit travers,  car il porte un message fort et authentique : il met en lumière les faiblesses et les absurdités de la loi moche et méchante pour faire éclore la grâce et la liberté qui permettent d’entretenir des relations constructives avec les autres.

Eloïse Auvray a su rompre avec les codes classiques de la narration puisque son roman débute sur des chapeaux de roues , elle ne laisse pas le lecteur faire connaissance avec Amy, dès les premières pages, le ton est donné : son destin est tout tracé : on l’entraîne avec dureté pour qu’elle serve toute sa vie dans l’une des unités opérationnelles de l’enceinte.

Ainsi, on rencontre une jeune fille seule au monde car toutes ses attaches familiales lui ont été arrachées lors d’un événement traumatisant dont elle ne se souvient que par des bribes.

Elle est sans cesse sur le qui-vive, accordant une confiance toute relative à ses proches, rendant coup pour coup quand on l’attaque. Puis une fameuse nuit initiatique va bousculer son état d’esprit.

Amy se rendra compte par la suite que nous avons tous besoin les uns des autres. Les règles inflexibles et rigides de l’enceinte sont peu de choses face à l’amour, l’amitié, la volonté de prendre soin, venir en aide à ceux qui nous entourent.

Les aventures d’ Amy se poursuivront dans trois prochains épisodes : quel sera l’heureux grain de sable (ou le grain de moutarde cité dans l’Évangile de Matthieu) qui viendra enrayer le fonctionnement de cette enceinte qui l’ embrigade?.

Les éditions MLK encouragent le talent des nouveaux auteurs. Si vous avez une jolie plume et des idées à coucher sur le papier, inscrivez vous au concours de nouvelles sur le thème de la féminité !

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