Adaptations littéraires au cinéma

Sur les chemins noirs, partir à la quête de soi grâce à la littérature et au cinéma…

Libraire et cinéphile, j’ai conseillé à de nombreux Kubers de lire Sur les chemins noirs, récit autobiographique de Sylvain Tesson publié en 2016 (535 000 exemplaires vendus, éditions Gallimard).

Ce roman raconte un périple à la quête de soi. Sylvain Tesson est un écrivain-aventurier qui a parcouru le monde notamment dans les terres arides de Sibérie. Il aime escalader des bâtiments et des immeubles pour faire rire ses amis les soirs de fête.

Sauf qu’un soir, il glisse et s’écrase huit mètres plus bas, face contre le trottoir. Pendant sa convalescence qui durera de longs mois, corseté et bien amoché, il décide d’entreprendre une randonnée de 1300 kms, seul le long de la diagonale du vide. Les nombreux flash-backs du film vont rapidement montrer aux spectateurs à quel point cette idée est risquée.

Je n’aime pas forcément ni la marche ni la randonnée car quand j’étais ado, mon père marchait toujours 50 mètres devant donc c’était une vraie corvée (solitaire en plus) pour moi. Je me suis bien reconnue quand Jean Dujardin explique que c’est compliqué de marcher avec quelqu’un qui n’a pas le même rythme. Mais je suis allée voir Sur les chemins noirs pour Jeannot et pour la beauté de la France hyper rurale.

«La France est un paradis peuplé de gens qui se croient en enfer»

La campagne me terrifie un peu, j’ai peur de m’y ennuyer, je suis une vraie citadine. Mais avec les confinements, la campagne a pris une sacrée revanche dans le cœur de beaucoup de Français… Même dans le mien. Le livre est paru en 2016. Entre-temps, cette pandémie mondiale a bouleversé tous nos repères, nous conduisant à revoir nos priorités, redonner un sens à notre vie.

Le sujet de ce film ce n’est pas la marche. Elle est un prétexte à l’introspection, la quête de soi. Ce film parle du deuil, de l’attachement, du couple aussi. Celui qui se délite, il n’arrive pas à retenir son amoureuse car il est coincé dans son lit d’hôpital après avoir brûlé la vie par tous les bouts… Grâce au cinéma, on aborde aussi le corps, de la douleur et du plaisir qu’il éprouve. Avec ce film, j’ai compris que dans la société actuelle, on fait taire son corps car on a mille préoccupations. C’est une belle connerie car quand le corps flanche, on ne vaut pas tripette.

C’est d’ailleurs ce que lui rappellent ceux qui l’accompagnent à un moment à un autre du film : sa sœur, sa tante, son ami et même le jeune Dylan qu’il rencontre à Vallon Pont d’arc. Les scènes où ils cheminent ensemble sont savoureuses.

J’aime énormément les adaptations littéraires au cinéma. Ensuite je compare le roman au film pour comprendre les choix ou les raccourcis pour transposer une œuvre littéraire à l’écran. Dans un tout autre genre, j’ai beaucoup apprécié Couleurs de l’incendie de Clovis Cornillac qui se passe totalement en ville avec Benoit Poelvoorde, mon autre acteur favori.

Dans la famille, nous aimons tous Jean Dujardin. Avec ma mère et mon frère, on se régalait le soir avant le journal télé avec Un gars, une fille sur France 2 avec Alexandra Lamy. Avec mon mari, qui a des goûts ciné très différents des miens, on se rejoint pour apprécier Un homme à la hauteur, Le retour du héros… On s’est bien marrés en famille devant le film I feel good où il interprète un crétin fini.

Je ne voyais pas d’autre acteur que lui pour jouer le rôle de Sylvain Tesson. Il l’incarne tout simplement avec sobriété et précision. Ils ont le même âge et partagent une passion pour la randonnée même si Jean Dujardin n’escalade ni des immeubles ni des gouttières.

Jean Dujardin est un acteur international, Sylvain Tesson est un écrivain reconnu. Ils sont familiers des milieux mondains filmés par flash backs dans le film et pourtant ce sont de vrais caméléons capables de se fondre dans le décor de la France rurale, de se dépouiller de tous ces artifices pour vivre un temps le plus simple possible.

Jean Dujardin est un immense acteur qui exprime beaucoup par ses silences, son souffle quand il marche dans les gravats et qu’il peine.

C’est son plus beau rôle selon moi et je lui souhaite enfin d’être récompensé par un César cette année… J’aime autant son jeu de taiseux solitaire ici que quand il fait le pitre dans OSS 117, Le Caire nid d’espion en poussant la chansonnette…

Merci C’est à vous pour ce moment suspendu, avec de la belle musique qui tranche avec l’actualité particulièrement morose et terrifiante pour notre pays. Visiblement Les Innocents et Jean Dujardin ont l’air assez complices. J’ai écouté en boucle ce tube Finistère qui décrit assez bien le film.

Même si j’avais peur de m’ennuyer de regarder un film qui parle d’une longue marche de 1300 kilomètres pendant deux heures, ce film m’a fait beaucoup de bien. Il m’a encouragée dans ma démarche de détox digitale les week-ends et il m’a permit de réfléchir sur de nombreux sujets très philosophiques : la modernité, comment consacrer son temps à ce qui est vraiment important.

Et surtout ce film m’a apporté l’essentiel : je chéris mon lit, ma couette et mon matelas moelleux après avoir vu des scènes et des scènes de bivouac à la belle étoile. On aurait presque dit que c’est moi qui ai randonné 1300 kilomètres… par procuration.

*Je vous recommande la chronique du film de Jean-Luc Gadreau sur son blog…

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